Le 11 février 2005, une loi fondatrice était adoptée en France, affirmant le droit pour les personnes en situation de handicap à une pleine participation à la vie sociale. Aujourd’hui, à l’occasion de son 20ème anniversaire, il est temps de dresser un bilan de cette avancée majeure, tout en réfléchissant aux enjeux qui subsistent !
Cinq progrès en deux décennies
- Accessibilité :
La loi a permis d’établir des normes claires pour l’accessibilité des lieux publics et des transports. Les ERP (établissements recevant du public) ont été soumis à des obligations strictes d’aménagement : par exemple, des rampes d’accès et des sanitaires adaptés sont devenus une règle pour les nouvelles constructions. Les gares ont progressivement vu l’installation d’équipements comme les ascenseurs ou les bandes podotactiles, tandis que les bus dans les grandes villes, comme Paris et Lyon, sont équipés de systèmes d’embarquement adaptés. - Santé :
La création des Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) a facilité l’accès aux droits et services spécifiques. Par exemple, elles permettent de centraliser les demandes d’allocations comme l’AAH (Allocation aux Adultes Handicapés déconjugalisée depuis octobre 2023 seulement, certes) ou la PCH (Prestation de Compensation du Handicap). - Scolarisation :
Le nombre d’élèves en situation de handicap intégrés en milieu ordinaire a plus que doublé. Aujourd’hui, des outils comme les ordinateurs équipés de logiciels adaptés ou les AVS (Auxiliaires de Vie Scolaire, devenus AESH) accompagnent les élèves au quotidien. - Emploi :
L’OETH (Obligation d’Emploi des Travailleurs Handicapés) impose aux entreprises de plus de 20 salariés de compter au moins 6 % de travailleurs en situation de handicap dans leurs effectifs. Depuis 2005, cette obligation a permis une progression notable, même si le chemin reste long : le taux de chômage est passé de 19 % en 2005 à environ 12% en 2024. Par ailleurs, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) a été renforcée pour faciliter l’accès à des aménagements adaptés et des aides spécifiques.
Des avancées encore insuffisantes
Malgré ces progrès, les attentes des personnes concernées restent élevées :
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Accessibilité
Malgré les obligations d’accessibilité, de nombreux lieux publics, transports, logements et outils numériques restent inaccessibles. Si les ERP nouvellement construits respectent souvent les normes, une large part des anciens établissements reste inadaptée.
Moins de 50 % des petits commerces sont accessibles, et certains lieux emblématiques comme les cinémas ou musées n’ont pas encore réalisé tous les travaux nécessaires. Dans les logements, les ascenseurs et aménagements spécifiques sont encore insuffisants.
On pourrait par exemple :
Accélérer les adaptations des infrastructures publiques et privées.
Instaurer des contrôles plus stricts et des sanctions effectives en cas de non-conformité.
Promouvoir le concept de « Design universel » dès la conception des bâtiments et des outils numériques.
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Santé :
Les délais pour accéder aux soins adaptés restent trop longs. Dans certaines régions, obtenir un rendez-vous avec un spécialiste, comme un ergothérapeute, peut prendre jusqu’à un an.
De plus, les démarches pour obtenir des aides (MDPH, PCH, etc.) sont souvent complexes, longues et décourageantes pour les personnes concernées et leurs familles. Il faudrait réduire les délais de traitement en augmentant les ressources humaines dans les MDPH ou encore permettre la reconnaissance automatique et à vie pour les handicaps permanents.
Aussi, les handicaps invisibles (fibromyalgie, TDAH, troubles psychiques, etc.) sont encore sous-reconnus, ce qui engendre des difficultés dans l’accès aux droits. Il serait nécessaire de mieux former les professionnels de santé et les MDPH sur ces pathologies et élargir la reconnaissance de ces handicaps dans les dispositifs d’aide existants.
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Scolarisation :
L’inclusion des enfants handicapés dans le système éducatif et des adultes dans le monde du travail reste inégale, avec des disparités géographiques et des retards dans la mise à disposition des aides humaines ou matérielles.
Les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) sont souvent en sous-effectif.
Certains enfants ne peuvent bénéficier que de quelques heures d’accompagnement par semaine, insuffisantes pour un suivi optimal.
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Emploi :
La réforme du secteur adapté soulève des inquiétudes, car elle n’est pas cohérente avec les capacités d’accueil du milieu ordinaire.
De plus, les managers et les entreprises manquent souvent de formation sur la notion de handicap, ce qui alimente des croyances limitantes.
Cette situation décourage parfois les collaborateurs à déclarer leur handicap ou à utiliser les dispositifs disponibles, par peur de stigmatisation ou de perdre leur emploi.
Cette réalité impacte leur confiance, leur estime d’eux-mêmes, et leur efficacité au travail, en somme : leur qualité de vie et leurs conditions aux travail.
Une responsabilité partagée pour des actions durables
Pour répondre aux défis persistants, un gouvernement stable et fiable doit porter des politiques ambitieuses et cohérentes, en assurant leur continuité et leur financement sur le long terme. Les changements durables nécessitent des investissements constants, comme le prouve l’exemple des pays scandinaves.
En Suède, les systèmes de soutien personnalisés pour les personnes en situation de handicap permettent une inclusion quasi-totale dans la vie sociale et professionnelle.
De même, l’Espagne a su renforcer l’accès à la scolarisation avec des programmes d’intégration ciblés.
S’inspirer des pratiques européennes et internationales peuvent nous permettre de nous améliorer et de faire de l’inclusion non plus un concept mais une réalité.
Le rôle des médias dans le regard sociétal
Les médias jouent un rôle crucial pour façonner le regard porté sur le handicap.
Des initiatives comme le film « Un p’tit truc en plus » de Artus en 2024 ou encore la couverture des Jeux Paralympiques de Paris 2024 ont montré l’impact positif d’une représentation valorisante et inspirante.
Ces événements ont contribué à déconstruire les préjugés et à promouvoir une vision inclusive et dynamique des capacités des personnes handicapées.
Aujourd’hui, la société de production Séquences Clés Productions a d’ailleurs lancé le premier manifeste en faveur de l’inclusion dans les métiers de l’audiovisuel afin d’alerter le secteur sur la nécessité d’embauche des personnes en situation de handicap et de leur représentation à l’écran, aujourd’hui levée à 1% seulement.
Ensemble pour une société inclusive
Pour accélérer le changement, nous devons unir nos forces. Le collectif ENSEMBLE, que j’ai co-créé avec Caroline Fruchaud, rassemble des entrepreneurs engagés à construire des solutions concrètes pour l’inclusion. L’idée est de partager nos constats de personnes concernées et oeuvrant chaque jour dans ce secteur pour proposer des solutions au plus près des besoins des citoyens.
De plus, actuellement vous pouvez rejoindre le mouvement de consultation citoyenne porté par Make.org sur l’inclusion et la diversité dans l’emploi.
Les initiatives sont nombreuses, la motivation est énorme car il est désormais nécessaire que les choses avancent pour faire valoir le droit à la considération, à la reconnaissance d’un statut qui ne nous définie pas, mais qui nous permet d’apporter un regard différent sur la société : celui d’être humain autrement.
Sources :
https://handicap.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_gillot_-_tome_1.pdf
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFSCTA000000911859
